Bruxelles, 16 août [18]68, dimanche, 7 h. ½ du m[atin]
J’espère, mon grand bien-aimé, que tu as, comme moi, passé une très bonne nuit et que tu m’aimes comme je t’aime. J’ignore si ton fils Victor ira à Spa aujourd’hui et par conséquent si, oui ou non, je passerai la soirée chez toi. Mais ce dont je suis sûre, c’est que je ne veux en rien peser sur toi et sur les tiens et que je me résigne d’avance à mon redoublement de solitude. Pourvu que je te sente content ainsi que toute ta famille, je me déclare satisfaite. Peut-être Madame Alice aura-t-elle la bonne inspiration de vous rendre le cher petit Georges aujourd’hui [1], ce qui serait, de sa part, une fière idée. En attendant, la pensée de ce doux et ravissant petit être ne me quitte pas et je sens le tressaillement de sa chère petite âme dans mon âme, à croire que c’est en moi qu’elle s’est réfugiée depuis qu’elle a quitté la terre. Je suis prête à vous la rendre le jour où Dieu et Madame Alice voudront.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 225
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
[Souchon]