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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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24 février [1840], vendredi soir, 5 h. ¾

Merci, mon Toto, merci, mon pauvre amour de la bonne petite nuit que tu m’as donnée. Je voudrais seulement que cela arrivât plus souvent, mais enfin le jour où ça vient c’est charmant. Tu penses bien, mon adoré, que je n’ai pas cru un seul instant à ta promesse de tantôt. Je sais bien que des culottes ne se mettent pas les unes sur les autres si ce n’est chez les paysans de Franconi [1]. Aussi je n’ai pas ajouté foi à celle de ce soir. Cependant si vous ne voulez pas passer pour le plus gascon des hommes vous n’avez pas de temps à perdre pour me donner celle que vous m’avez promise depuis si longtemps. Voici votre pièce qui va arriver et pendant laquelle vous ne pourrez rien faire pour mon bonheur personnel. Vous devriez auparavant de la mettre en train me donner la joie de dîner avec vous au cabaret et de passer la soirée avec vous n’importe où et surtout dans mon lit. Le 26 février [2] par exemple, ce serait bien charmant ; c’est une époque solennellea pour tout le monde et surtout pour moi qui, non seulement vous admire, mais vous adore. Voyez donc, mon cher petit homme, si vous ne pourriez pas arranger cela au gré de mon cœur, de ma joie et de mon amour. Je t’écris les fenêtres ouvertes pour profiter des derniers moments du jour et pour donner à la cheminée le temps de s’échauffer. J’ai vu le blanchisseur, j’ai rangé mon linge et fait ma toilette entièrement. On n’est pas plus expéditive, j’espère. J’aurais comptéb sur votre promesse que je ne me serais pas plus dépêchée mais Dieu sait que je n’y ai pas compté et que c’est pour me débarrasser au plus vite de moi que je me suis tant pressée. Vous allez avoir un fouillis d’amour et de bavardage à débrouiller ce soir. Je vous permets de jeter tout cela au feu en pensant que je vous aime et en vous chauffant à la flamme de vous souvenir que je suis votre pauvre Juju depuis sept ans sonnés, que je vous aime comme le premier jour et que je donnerai ma vie pour vous. Baisez-moi mon Toto, pensez à moi et ne soyez pas huit heures avant de venir prendre mes baisers qui me démangent les lèvres pour sortir. À bientôt mon petit homme adoré, à bientôt n’est-ce pas ? Tâche de venir avant 2 h. du matin. Je suis déjà impatiente de voir ta jolie petite tête ainsi [Juju ?] [illis.] sera tout à [illis.].

Juliette

BnF, Mss, NAF 16341, f. 196-197
Transcription de Chantal Brière

a) « solennel ».
b) « compter ».

Notes

[1Personnages du Cirque Franconi.

[2Jour de la naissance de Victor Hugo.

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