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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Jersey, 9 octobre 1852, samedi matin, 7 h. ½

Bonjour, cher bien-aimé, bonjour, avec l’espoir d’une belle journée, bonjour. Je t’écris avec toutes mes fenêtres ouvertes, les yeux et l’âme tournésa de ton côté. Il est probable que tes fils voudront profiter de cette belle journée pour faire avec toi une excursion dans l’île et je ne peux pas m’empêcher de les approuver, tout en regrettant de ne pas pouvoir en prendre ma part, et quoique je ressente d’avance la tristesse de ton absence. Mais le besoin de savoir tous ces jeunes cœurs heureux par toi l’emporte sur mon propre égoïsme et c’est du meilleur de mon cœur que je te souhaite une belle journée, une bonne et charmante promenade et beaucoup d’encriers. Heureuse nouvelle ! FAIDÈLE [1] est retrouvé d’hier au soir ! Pendant que son maître était de garde dans le port pour toute la nuit, il est venu se jeter dans ses jambes qu’il a embrassées, comme dit Suzanne. Ce que voyant, son maître le reçut à bras ouverts, s’assura qu’il n’était pas blessé et le ramena heureux et triomphant au logis où je viens de le voir et de le caresser tout à l’heure. À propos de chien, je vous dirai que j’ai trouvé quatre louis d’or de mon chat. Ma cupidité fut un instant ébranlée mais je me souvins de l’histoire de l’aveugle du Pont-Royal et de son enfant [2] et je ne voulus point courir le risque des affreux remords pour si peu de livres sterlings. Il est probable que la même cause a déterminé les regrets cuisants du bonhomme, aveugle mais canaille, du susdit pont, de plus en plus royal. Je garde mon chat, jusqu’à la concurrence de pas mal de cinquante centimes additionnels, tel est mon désintéressement. Je ne veux pas abuser de MA GRANDEUR et je vous aime à millions et à milliards. Ma Californie d’amour me permet ce luxe.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16372, f. 33-34
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette

a) « tournée ».

Notes

[1Chien des propriétaires de Juliette qui s’était perdu. Voir lettre du 8 octobre 1852, vendredi midi.

[2À élucider.

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