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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Bruxelles, 25 avril 1852, dimanche matin, 8 h.

Bonjour, mon bon petit homme, bonjour. Dormez et reposez-vous des fatigues de votre soirée car je suppose que vous n’avez pas été sans ferrailler de l’esprit et de la prunelle avec les diverses femelles qui s’y trouvaient. Je compte sur la MÈRE Reybaud pour me rendre bon compte de vos exploits. D’ici là je vous engage à dormir sur vos deux oreilles et à rêver le reste si vous pouvez. Quant à moi ma soirée a été des plus ternes. J’ai tiré l’aiguille jusqu’à 11 h. pendant que M. Luthereau roupillait sous prétexte de lire le journal. Ce que voyant et n’ayant d’ailleurs aucun espoir de vous revoir je suis montée me coucher assez piteusement. Ç’aurait été pourtant le cas de vous servir de votre absence de clef pour me demander l’hospitalité. Il me semblait même que c’était uniquement pour ces occasions-là que vous aviez refusé d’en avoir une seconde. Mais puisque vous ne le comprenez plus ainsi n’en parlons pas davantage et que votre volonté soit faite. Je voudrais bien pouvoir reprendre de vos griffes le passe-partout de mon cœur, du diable si je vous y laissais jamais rentrer. Voime, voime, ma pauvre Juju, tu ne t’en serviraisa que pour lui ouvrir la porte à deux battants, c’est connu et le susdit Toto se fiche de toi et de tes griefs. Tout cela n’est que trop vrai mais qu’y faire ? Je fais le remède homéopathique et je t’aime encore plus et de pire en pire nous verrons si je finirai par en guérir. J’en doute au risque de jurer devant la reine.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16370, f. 335-336
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette

a) « servirait ».


Bruxelles, 25 avril 1852, dimanche, midi.

Je suis encore sous l’impression de notre charmante promenade d’avant-hier, mon petit bien-aimé, aussi il n’y a pas de danger que je veuille la gâter aujourd’hui par une bête de promenade toute seule. J’attendrai que le besoin impérieux d’exercice se fasse sentir pour vaguer dans les rues de Bruxelles comme un chien perdu. Jusque-là, mon petit homme, je préfère rester là où j’ai l’habitude de vous attendre de vous désirer et de vous aimer. J’espère, malgré le peu de certitude que tu m’as fait donnera par Suzanne, que tu viendras tantôt de bonne heure ou au moins quelques instants avant ton dîner. Je me fais cette illusion pour prendre mon courage en patience. En attendant Suzanne paraît fort tourmentée du sort de votre déjeuner que vous ne paraissez pas disposé à manger tout de suite et qui sera exécrable froid. Mais qu’y faire ? Qu’est-ce qui vous donnera jamais de la régularité en rien ? Pour ma part j’y renonce. Cher petit homme, ce serait pourtant une bonne habitude à prendre que celle des repas à heure fixe. Après cela je comprends que tu ne puissesb pas astreindre ta pensée aux exigences de ton estomac et de ta santé, c’est un malheur qu’il faut accepter puisqu’on ne peut pas faire autrement. Mon cher petit Toto, mon bien-aimé, tâche de venir le plus tôt que tu pourras. En t’attendant je vais copier ardemment les nouvelles feuilles que tu m’as données. Et puis je te baise depuis A jusqu’à Z.

Juliette

Dimanche 1 h. Je sors, mon pauvre bien-aimé, pour t’obéir et pour faire plaisir au Père Luthereau qui du même coup fait sortir sa femme. Nous serons de retour vers quatre heures. Je t’aime mon Victor. Aime-moi aussi un peu.

BnF, Mss, NAF 16370, f. 337-338
Transcription de Bénédicte Duthion assistée de Florence Naugrette

a) « donnée ».
b) « puisse ».

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