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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 18 octobre 1862, samedi matin, 8 h. ½

Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour de pied en cap et victoire partout. Jamais je n’ai passé une meilleure nuit que celle-ci et je me porte comme trois pont-neufs. Et pour peu que tu en aies autant à mon service, je suis la plus heureuse et la plus vaillante des Jujus. Cher adoré, je te souris mais au fond de mon cœur je suis triste de ma mauvaiseté envers toi, le meilleur, le plus doux, le plus généreux et le plus grand des hommes. Il faut que j’aie une bien mauvaise nature, ou que je t’aime trop, pour te tourmenter sans cesse et à propos de tout comme je le fais. Et cependant je sens que je donnerais mille fois ma vie pour toi, que je ne vis qu’en toi, que tu es la chair de ma chair et l’âme de mon âme. Cela étant, et bien plus que je ne peux te le dire, il semblerait que je devrais avoir confiance en toi et en moi et que votre bonheur ne devrait jamais être troublé. Cependant il n’en est rien, hélas ! À quoi cela tient-il et que faire pour te rendre heureux puisque de t’aimer avec tout mon cœur ne suffit pas, au contraire ? T’aimer moins, peut-être, c’est-à-dire n’aimer pas, car pour moi c’est la même chose. Mais ce remède serait pour moi pire que le mal et d’ailleurs cela m’est impossible et j’aime mieux mourir tout de suite en t’adorant.

BNF, Mss, NAF 16383, f. 214
Transcription de Camille Guicheteau assistée de Guy Rosa

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