Guernesey, 31 décembre 1861, mardi matin, 8 h.
Bonjour, mon adoré petit homme, bonjour de toute mon âme. Bénie soit cette année qui t’a rendu la santé et qui a donné la vie aux Misérables. Que Dieu te donne de longues années de bonheur et de gloire et qu’il te bénisse dans tous ceux que tu aimes et qui t’aiment. Et à ce sujet, mon bien-aimé divin, promets-moi de te rappeler cette pauvre petite Mme Chenay. Je serais si heureuse si je pouvais lui donner demain pour étrennes le bon saint Paul [1]. Je sens que ce serait pour elle le plus grand bonheur que tu pourrais lui faire même en dehors du GAIN DE SON PROCÈS, comme elle appelle cette stupide affaire Messonnier [2]. Quant à moi, je ne te parle pas de ma joie mais de ma SUPERSTITION. Il me semble que ce serait bien commencer l’année que de la commencer par cette bonne action et qu’elle nous porterait bonheur à nous-mêmes. Cher adoré, penses-y et vois ce que tu peux faire pour cette bonne petite femme qui en somme n’a pas beaucoup de chance en dehors de ton asile, de ta protection et de ton affection. Ne croyez [pas] pour cela que je renonce à mes propres étrennes, c’est-à-dire à ma chère petite lettre annuelle, ne fût-ce qu’une ligne, un mot, un baiser.
BnF, Mss, NAF 16382, f. 195
Transcription de Florence Naugrette