[7 décembre 1833] [1]
4 ¼
[Peu avant le 16 décembre 1833]a [2]
Je rentre. Tu n’es pas encore venu – Mon Dieu, j’avais cependant bien besoin de te voir – Les plus sinistres pensées – se tirent et se déchirent mon cœur – Demain – demain peut-être – l’opprobre aura succédé à la misère et la honte – Mon Dieu, Victor, que fais-tu donc à cette heure ? – Quand je meurs de douleurs et de craintes –
8 h.
Pas encore – et c’est aujourd’hui que tu me manques – quand tu es toute ma force – tout mon courage – toute ma foi – Victor – Victor – le sort est bien cruel envers moi – Mon Dieu – mon Dieu, que faire, que devenir –
Il faut que j’assiste demain en personne au tribunal de police correctionnelle, pour y être peut-être jugéeb comme coupable de soustraction d’effets saisis chez moi – à deux ans de prison. Mon Dieu, depuis cette conférence que j’ai euec tantôt avec mon huissier et mon avoué de deux heures à quatre – je suis folle, folle – Je sens bien que ma raison n’en peut supporter davantage – Et pour finir ma journée, tu ne viens pas, tu ne viendras pas. À quoi m’auront servi ma confiance en ton amour, ma foi en l’avenir et mon courage – Tu m’abandonnes toujours au moment du danger. Oh, Victor, Victor – tu es bien coupable – et moi bien malheureuse –
Oh, je souffre ! Pardonnez-moi cette lettre, son désordre, ses expressions et sachez bien que, quoi qu’il arrive, je vous aimerai toujours passionnément.
Juliette
8[h.] ½
[Adresse]
Pr M. Victor
2e lettre
BnF, Mss, NAF 16322, f. 269-270
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
[Blewer]
a) Date rajoutée par Evelyn Blewer dans son ouvrage.
b) « jugé ».
c) « eu ».