Paris, 23 avril [18]72, mardi matin 6 h. jour de saint Georges
Cher adoré, je te salue au nom de ton cher absent [1] qui est là-haut et de ton adorable petit-fils dont c’est la fête aujourd’hui. À défaut d’esprit qui me manque pour parler dignement de cette grande âme envolée et des fleurs dont je voudrais inonder petit Georges ce matin, je te donne ce que j’ai de meilleur en moi-même : mon amour. Fais-en le partage comme tu l’entendras sans craindre de l’épuiser. J’espère que tu as passé une bonne nuit et tout ton monde aussi. Moi, je continue ma série de nuits blanches. Cependant pour varier un peu cette monotonie blafarde, j’envoie chercher un bain que je vais prendre tout à l’heure. Je m’étais bercée de la douce pensée d’avoir Petit Georges à dîner ce soir, mais la maladie de plus en plus accentuée de la pauvre petite portière m’empêche de donner suite à ce projet. Pour me consoler je me dis que ce n’est que partie remise et que tu voudras bien que je fasse un petit [Rappel ?] plus tard, n’est-ce pas, mon adoré ?
BnF, Mss, NAF 16393, f. 112
Transcription de Guy Rosa