Guernesey, 23 avril 1858, vendredi 4 h. ¾ après midi
Je viens de finir de copire ce que j’avais du manuscrit de Charles Hugo [1], mon cher petit homme, honteuse de mon inhabilité et regrettant de n’en pas copier la suite, non seulement pour donner à Charles cette marque d’obligeance mais pour savoir la fin de ce charmant petit roman si bien commencé. En attendant, je te fais savoir que je suis toute entière à ta disposition à pied, à cheval, à patte, à âne, à aile, à âme et à cœur. Dans ce moment-ci même s’il te plaisait de grimper sur la montagne, je t’y suivrais avec emportement. Malheureusement, tu n’es pas prévenu et il n’est pas probable que tu reviennes avant six heures. Ah ! Voici les aboiements de Chougna mais ils s’éloignent et se perdent du côté de la ville ce qui ne me permet pas d’espérer te voir tout de suite. À propos de TOUT DE SUITE, tu devrais bien me donner de ta propre copire pour que je m’avance dans MON TRAVAIL pendant que les jours sont longs et que tu es d’occupé d’autres choses. De cette façon, je pourrais arriver à L’AISE et sans trop d’essoufflement au moment où Hetzel fera feu des quatre pieds pour publier Les petites Épopées [2]. Ah ! Vous voilà quel bonheur, quel bonheur, quel bonheur ! J’achève de vous distiller ma restitus pendant que vous lisez vos journaux. Tenez ! je vous aime et j’en suis bien heureuse ! Attrapéa.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16379, f. 85
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette
[Blewer]
a) « attrappé ».