Guernesey, 20 octobre 1856, lundi matin, 8 h.
Bonjour, mon doux adoré, bonjour, mon pauvre [illis.], bonjour. Comment as-tu passé la nuit et comment vas-tu ce matin ? J’ai peur que tu n’aies beaucoup souffert cette nuit [1] ? Tu n’es pas revenu hier et je t’en approuve et même je te remercie car tout ce que tu fais pour t’épargner une souffrance ou pour hâter ta guérison m’inspire une tendre reconnaissance mille fois plus grande que si c’était pour mon propre compte, car mon âme souffre plus à travers tes maux que par les miens personnels. Tu sais que c’est aujourd’hui que je commence mon opération de déménagement [2], ce qui ne t’empêchera pas de venir me voir si tu vas dans ta maison puisque nous sommes maintenant porte à porte. En attendant, j’espère que je te verrai ce matin, à moins que tu ne sentes que cela ne te fatigue trop. Je te recommande sur toute chose et avant mon bonheur de ménager ta pauvre jambe qui fait partie de mon cœur. Il faut que je me décide aujourd’hui à acheter la table et les chaises puisque c’est de première nécessité et que d’ailleurs cette dépense doit être faite une fois pour toutesa puisque nous nous installons ici à fer et à CLOU [3]. Taisez-vous, mon pauvre éclopé, taisez-vous, guérissez-vous et aimez-moi et je vous pardonne de me faire mal à votre GAMBE.
Juliette
Bnf, Mss, NAF 16377, f. 256
Transcription de Mélanie Leclère assistée de Florence Naugrette
a) « toute ».