Guernesey, 5 juillet [18]64, mardi matin, 8 h.
Bonjour, mon cher bien-aimé, bonjour et sourire, si tu as bien dormi autant que moi toute la nuit. Est-ce aujourd’hui que tu veux aller à Plainmont [1] ? Dans ce cas-là il faudrait envoyer prévenir le cocher le plus tôt possible à cause du beau temps qui met tout le monde en furie de villégiature et de promenade.
Quant à moi, pourvu que je sois avec toi peu m’importe que ce soit à pied, ou à patte, en voiture ou en bateau, ici ou là, au nord ou au midi ! Donc ne te gêne pas pour faire cette promenade aujourd’hui plutôt qu’un autre jour. J’espère, dans tous les cas, que ton petit Toto [2] en sera puisqu’il a tout sujet de contentement et de tranquillité maintenant du côté de George Road [3]. Je me suis même dispensée d’envoyer savoir des nouvelles ce matin, ne voulant pas déranger inutilement ces dames puisque je sais que tout va bien. Je ne te demande pas de venir travailler auprès de moi, non que je ne le désire de toute mon âme, mais parce que je vois que cela t’est presque impossible. Tu y asa mis beaucoup de complaisance et de bonne volonté jusqu’à présent sans pouvoir y parvenir. Aussi mon cher bien aimé, je ne veux pas t’en faire une SCIE en t’en parlant tous les jours. J’aime mieux te laisser toute liberté de corps et d’esprit afin de pouvoir me réjouir sans contrainte chaque fois que tu viendras, de toi-même, passer quelques instants avec moi dans la journée. En attendant, mon cher petit homme, je tourne ma pensée, mes yeux et mon cœur de ton côté et je t’envoie toutes mes tendresses.
J.
BnF Mss, NAF 16385, f. 179
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Florence Naugrette
a) « tu y a ».