Paris, 29 février [18]72, jeudi matin, 9 h.
Bonjour, mon inépuisablement grand, bon et sublime bien-aimé ; bonjour et bonne chance au vaillant Rappel que je guette au passage tant je suis impatiente de le revoir et de reprendre possession de lui. Maintenant qu’il a fait la longue et dure expérience de la loyauté de ses adversaires et de leur façon de combattre, il faut qu’il se cuirasse d’une triple prudence à l’épreuve de toutes les armes empoisonnées dont on s’est servi contre lui jusqu’à présent et qu’il se garde de leurs traquenards perfides et de leurs pièges à loups dont ils savent faire au besoin des pièges à lions. Ce que j’en dis n’est pas pour lui donner un conseil outrecuidant de ma part et dont il n’a pas besoin, mais parce que je m’intéresse à tout ce qui lui arrive, soit pour m’en attrister, soit pour m’en réjouir. J’espère que tu as passé une bonne nuit et tout ton petit monde aussi. J’attends que Suzanne me rapporte de bonnes nouvelles de vous tous. En attendant je vais doubler la pauvre Henriette dans son service encore aujourd’hui et probablement les jours suivants car je ne vois pas d’amélioration sensible dans son état. Heureusement que je reprends force et courage en t’aimant de toute mon âme.
BnF, Mss, NAF 16393, f. 57
Transcription de Guy Rosa