Paris, 27 septembre [18]73, samedi matin, 6 h. ¾
Cher cher bien-aimé, depuis ces horribles huit jours passés dans le désespoir des damnés [1], c’est le premier jour aujourd’hui où en même temps que mes yeux, ma bouche, mon cœur, mon âme s’ouvrent pour regarder Dieu, pour te sourire, pour te prier, pour te bénir. Ceta horrible rêve est donc fini ! C’est bien vrai que tu m’aimes, que tu n’aimes que moi, que ta vie est faite de la mienne comme la mienne de la tienne. Nous ne quitterons plus jamais ni ici, ni ailleurs, je t’aimeraib tant et à mailles si serrées que rien ne pourra passer entre ton cœur et le mien. L’amour partagé c’est la soudure de deux âmes, rien ne peut les séparer que l’infidélité. Dieu lui-même s’il le voulait ne le pourrait pas car l’amour à deux c’est l’invincible puissance contre toutes les forces réunies. Aimons-nous, mon adoré, aimons-nous, aimons-nous et que cette cruelle épreuve soit le gage de l’indissolubilité de nos deux âmes pour l’éternité. Je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16394, f. 273
Transcription de Manon Da Costa assistée de Florence Naugrette
[Guimbaud, Souchon, Massin]
a) « c’est ».
b) « t’aimerais ».