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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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3 juin 1838

Dimanche, 3 juin [1838], 11 h. ¼ du matin

Bonjour mon petit bien-aimé. Je vous aime, pensez à moi et aimez-moi un peu. C’est aujourd’hui grande fête pour tout le monde, il n’aurait tenu qu’à vous que c’en fût une aussi pour moi. Mais vous aimez mieux rester chez vous, ce que je n’ai pas beaucoup de peine à comprendre après cinq ans et demia d’amour de mon côté, et autant de dévouement, de fatigue et d’ennui du vôtre. Au reste vous avez peut-être bien fait, je suis malade ce matin, non pas sérieusement mais d’une incommodité périodique fort sale et fort gênante. Je vous aime Toto. Jour. Vous êtes un petit bêtab si vous m’aimez de ne pas mettre à profit tous les petits moments que vous avez de libres, avec toutes ces rognures-là, je me ferais un morceau de bonheur plus grand que le ciel. Pourquoi donc ne mettez-vous pas à même ? Voilà le temps qui se gâte. Je dirais tant mieux si cela pouvait vous faire rester chez moi toute la journée, mais comme je sais que la pluie ni le vent ne vous empêchent de battre le pavé, je dis tant pis. Je vous aime, mon Toto. Je t’aime, mon Victor.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 224-225
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain

a) « cinq ans et demie ».
b) « bêtat ».


3 juin [1838], dimanche soir, 5 h.

Dans toutes les inconséquences et les méchancetés d’une bête comme moi, il y a plus d’amour et de passion que dans toute la logique et la douceur d’un grand Toto comme vous. Ce qui veut dire que ma boutade de tantôt ne prouvait qu’une chose, que je vous aime plus que vous ne pourrez jamais aimera qui que ce soit ou quoi que ce soit, voilà mon opinion. Je pense aussi que vous auriez pu souper avec moi, ce qui n’aurait pas nui à vos affaires et à mon bonheur. Je suis toujours à la quête d’un petit moment de joie que vous ne laissez pas souvent tomber dans mon cœur. La charité s’il vous plaît. Vous faites la sourde oreille, vous êtes un vieux vilain Toto, et puisque vous tenez à vous crever les yeux, je vous donne en lettres noires tout l’amour qui dans mon cœur est écrit en lettres de flammes. Je vous en donne par les pieds et par la tête. Si vous pliez sous le poidsb, tant pis pour vous. Pourquoi que vous m’en demandez ? En voilà encore, tenez, tiens, en veux-tu en voilà, débarbouillez-vous en comme vous pourrez, tout ça ce sont des baisers.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16334, f. 226-227
Transcription d’Armelle Baty assistée de Gérard Pouchain

a) « aimé ».
b) « poid »

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