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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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17 avril [1836], dimanche matin, 10 h.

Bonjour, mon cher bien aimé. Je suis en colère contre moi pour m’être endormie de ce sommeil de plomb cette nuit. Une autre fois, je laisserai ma bougie allumée toute la nuit s’il le faut et je ne dormirai que d’un œil. De cette façon, je t’aurai plus longtemps et plus entièrement avec moi. C’est bien le moins que je profite des bons petits moments que tu dérobes à ton travail.
Bonjour, mon Toto chéri. J’ai rêvé de vous toute la nuit et je vous ai bien aimé, allez. Oh ! vous ne perdez pas à ce que je dorme, car je vous aime de toute mon âme comme si j’étais éveillée. Mais, moi, j’ai perdu cette nuit un bonheur que vous m’auriez sans doute donné si je ne vous avais pas obéi en restant à moitié éveillée. Une autre fois vous ne m’y attraperez plus, je frotterai si bien mes yeux et je sauterai si fort à votre coua qu’il faudra bien que vous restiez auprès de moi un bon moment, bien employé. En attendant cette occasion, je suis bien triste d’avoir perdu celle de cette nuit, je m’en veux de toutes mes forces, je me donnerais des coups si je pouvais.
Je t’aime, va. Rappelle-toi toutes les marques d’amour que je te donne tous les jours et à tous les instants de ma vie. Aujourd’hui, j’ai plus que besoin de te voir, il fait un temps ravissant, eh bien, je ne te verrai peut-être qu’un quart d’heure ce soir bien tard. Eh bien, ce quart d’heure d’amour vu en perspective me donne la résignation de supporter une longue journée enfermée seule. N’est-ce pas que je t’aime ?

J.

BnF, Mss, NAF 16326, f. 314-315
Transcription d’André Maget assisté de Guy Rosa

a) « coup ».


17 avril [1836], dimanche soir, 8 h. ½

Mon cher petit homme adoré, à présent que vous êtes parti, Dieu sait quand je vous reverrai. Aussi, je vais m’empresser de me coucher pour n’être pas obligée d’allumer du feu. Cependant j’aurais bien désiré voir CRÈCE Borgia, mais vous êtes un affreux Toto et vous ne tenez pas le moins du monde à faire plaisir à votre pauvre Juju. Ce qui ne l’empêche pas de vous aimer de toutes ses forces et de vous trouver le plus beau et le plus noble de tous les hommes qui existent ou qui ont existé. Ça prouve que je t’aime, voilà tout, ça prouve encore que plus je t’aime, plus JE T’AIME.
J’ai déjà un grand mal de tête, je ne sais pas à quoi cela tient mais je les ai bien plus fréquents maintenant qu’il y a un an. Cela tient à ce que je souffre trop, vois-tu. Cela tient à ce que vous ne m’aimez pas assez, voilà à quoi cela tient. Mon cher petit Toto, vous croyez peut-être que je vous dis cela en riant ? Eh bien vous vous trompez. Ce que je vous dis là, je le pense et je vous le dis sérieusement et j’en suis triste. Je vois bien que vous ne m’aimez plus autant qu’autrefois et ce qu’il y a d’affreux, c’est que je sens en même temps que je vous aime plus, bien plus. Je t’aime.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16326, f. 316-317
Transcription d’André Maget assisté de Guy Rosa

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