Guernesey, 21 octobre 1861, lundi matin, 7 h. ½
Bonjour, mon doux adoré bien aimé, bonjour à deux genoux. Je baise tes mains le cœur contrit et l’âme radieuse. Ô mon cher bien aimé ! Je te promets par ce que nous avons de plus cher, de plus doux et de plus sacré, par nos deux enfants dans le ciel, de ne plus te tourmenter et de m’en fier entièrement à toi. J’en prends l’engagement devant Dieu, demandant à nos deux chères âmes de servir de caution de la sincérité de la mienne et pour qu’il ne reste plus rien entre nous de la douloureuse scène d’hier, mon pauvre adoré, pas même le souvenir, je te supplie de ne pas te préoccuper de changer ta promenade habituelle. À ton tour d’avoir confiance en moi, mon cher adoré et de croire à mes promesses. Va donc librement et sans aucune espèce de crainte devant toi sans te soucier des rencontres possibles. Tu m’aimes je n’ai plus peur de rien. La précaution maintenant ne serait plus qu’un rappel fâcheux et triste de ce qui doit être à jamais oublié et effacé entre nous. Ô, mon adoré bien aimé ! Ne doutons plus jamais l’un de l’autre ! Vivons et mouronsa la main dans la main l’un de l’autre, cœur à cœur et nos deux âmes indissolublement enlacées pour l’éternité. Dès aujourd’hui, mon doux adoré, reprends toute ta liberté avec toute confiance et ne crains plus le retour de la triste violence d’hier. Je t’aime et je suis sûre de ton amour comme du mien.
BnF, Mss, NAF 16382, f. 130
Transcription de Florence Naugrette
a) « mourrons ».