12 janvier [1849], vendredi matin, 9 h. ½
Bonjour, mon bien-aimé, celui-ci n’est que le troisième, car en passant ce matin et tout à l’heure sous tes croisées mon âme a été te dire un petit bonjour amoureux et plaintif à travers les vitres de ta chambre. Je ne sais pas si tu dormais, car tu es dans l’habitude de ne pas fermer tes rideaux. Il résulte de mon observation que je suis on ne peut pas plus fondée de n’avoir pas songéa à louer dans la maison en face faisant le coin du passage qui va à la rue des Martyrs. J’aurais eu le bonheur de voir tes croisées et quelquefoisb aussi ta chère petite ombre aller et venir dans ce grand appartement [1]. L’été même nous aurions pu établir un télégraphe intérieur qui n’aurait été connu que de nous, les voisins n’existant pas. Je t’assure que je parle sérieusement et que si j’avais un mobilier moins immeuble, j’aurais donné congé aujourd’hui même de mon bête de logis [2]. Malheureusement j’ignorais le fait de ce passage et de cette rue, sans cela je n’aurais pas manqué d’en profiter coûte que coûte. Je suis rentrée chez moi en proie à ce regret et avec la perspective d’une immense et éternelle journée sans te voir pour consolation. Tout cela n’est pas gai, il faut en convenir et il faut plus qu’une dose de patience, de résignation et de courage pour ne pas jeter le manche après la cognée et pour ne pas pousser d’affreux cris de douleur et de rage.
Leeds, BC MS 19c Drouet/1849/08
Transcription de Véronique Heute assistée de Florence Naugrette
a) « songer ».
b) « quelques fois ».
12 janvier [1849], vendredi, midi ½
[image manquante]
BC MS 19c Drouet/1849/09
Transcription de Véronique Heute