Guernesey, 26 septembre 1859, lundi, 1 h. après-midi.
À quelque heure que je prenne mon cœur, je le trouve plein de toi, mon cher bien-aimé. À minuit comme à midi, c’est toujours toi que j’aime, c’est toujours toi, rien que toi, que je désire et que j’espère. Maintenant que voilà ta plus grosse visite partie, tu pourras me donner un peu plus de temps et profiter de toutes les averses pour me promener sous lesa gouttièresb, n’est-ce pas mon cher petit gribouille ? J’y compte bien, d’ailleurs, et voilà deux jours déjà que je me tiens sous les armes dès le matin dans l’espoir d’une pluie battante qui ne peut plus tarder longtemps ; c’est à vous n’en pas laisser échapper une seule gouttec. En attendant, je raccommode mes zardes [1], ce qui n’est pas très folâtre. Et à ce propos, je te prierai, si l’invitation à Guérin n’est pas encore faite pour mercredi, de l’ajourner car je ne me sens pas en train en ce moment de resserrer notre connaissance. La pensée de Quesnard et de sa perfidie me fait craindre plutôt que souhaiter de nouvelles relations. Je ne suis bien en sûreté et heureuse qu’avec toi, par toi et pour toi. Voilà la sainte vérité.
Juliette.
Bnf, Mss, NAF 16380, f. 216
Transcription de Mélanie Leclère assistée de Florence Naugrette
a) « le ».
b) « goutières ».
c) « gouttes ».