Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1843 > Novembre > 24

24 novembre [1843], vendredi matin, 10 h.

Bonjour mon Toto adoré, bonjour le bien-aimé de mon âme, bonjour, je t’aime, je te bénis, je t’adore, tu es mon amant ravissant, tu es mon bel ange gardien.
J’ai rêvé de toi et de cette pauvre mère Pierceau toute la nuit. Je ne suis pas une seconde de ma vie sans parler de toi. Je t’aime dans tout mon être, mon Victor bien-aimé tu es ma vie.
Ne crois pas que ce soit mauvais caractère quand je suis jalouse de toi, mon Toto. Si tu savais combien ta présence est ma vie et ma joie, tu comprendrais quel cas je fais de quelques minutes de plus ou de moins perdues pour moi, sans une absolue nécessité pour tes affaires et pour ta famille. Tu me comprends quoi que je te dise cela tout de travers ? Tu sais bien ce que je veux dire, n’est-ce pas ?
J’ai prié ce matin et hier au soir pour ce pauvre père pour que le bon Dieu lui donne dans le ciel le repos et le bonheur qu’il n’a pas eu sur la terre.
J’ai prié pour toi, mon adoré et pour tous ceux que tu aimes. C’est une prière de tous les instants et la plus fervente que je puisse trouver dans mon cœur. Mon bien-aimé tu ne sauras jamais, du moins sur la terre, combien tu es aimé par ta pauvre Juju. Si tu peux venir tantôt me voir tu me combleras de joie mon Toto et cela me donnera du courage pour le reste de la soirée. Si tu ne le peux pas, mon cher petit, je tâcherai d’être bien résignée et bien courageuse.
En attendant, je pense à toi, je t’aime et je t’adore. Pense à moi aussi, mon bien-aimé, moi je t’en prie à genoux.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16353, f. 87-88
Transcription de Olivia Paploray assistée de Florence Naugrette


24 novembre [1843], vendredi soir, 4 h.

Je t’ai à peine vu, mon adoré, et cependant cet éclair de bonheur m’a redonné du cœur au ventre. Je sais que tu as pensé à moi, je sens que tu m’aimes. Cela me donne de la force et du courage pour attendre. Maintenant, si tu reviens bientôt je serai au comble de la joie.
J’ai un peu la migraine mais j’espère que cela se passera quand j’aurai réchauffé mes pieds que j’ai comme des verrous. Je suis entourée de toute ma ménagerie, j’ai l’air d’une vieille sorcière. Il ne me manque plus, pour être au grand complet, que les deux ravissantes salamandres d’eau du boulevarda. Voime, voime, ça serait très complet et très gentil. Prends garde de le perdre. Pour que rien ne manque à mes attributs cabalistiques j’ai la fameuse baguette sur ma table à côté de moi. Prenez garde à vous Toto car si je devine que vous m’êtes infidèle je vous en ficherai des bons coups sur le nez quoique vous n’ayez pas de plumes. Je suis féroce et je tape partout, voilà mon genre.
Baisez-moi tout de suite et donnez-moi la patte. Tâchez de ne pas vous mouiller jusqu’aux os mon cher petit vagabond et revenez bien vite vous sécher à mon feu. Je vous baiserai bien, je vous caresserai bien, je vous dorloteraib bien pour la peine. Entendez-vous mon cher petit ? D’ailleurs ça me guérira mon mal de tête de vous voir, vous ne pouvez pas me refuser ça.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16353, f. 89-90
Transcription de Olivia Paploray assistée de Florence Naugrette

a) « boulevart ».
b) « dorlotterai ».

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne