14 décembre 1877

15 décembre 1877

Paris, 14 décembre [18]77, vendredi matin

Serment d’ivrogne que le mien et je cours ce matin même m’enivrer du Sénat [1] qui depuis sept mois nous verse toujours du même tonneau. J’espère qu’il n’en changera jamais.
Tu me fais dire d’être prête à midi moins un quart, je le serai. C’est bien le moins qu’on ne manque pas une si belle occasion de perdre son temps, son argent et sa belle jeunesse à courir après un ministère Dufaure et autre Waddington [2]. Il est probable que je serai forcée de t’attendre au moins une heure en voiture. Heureusement qu’il gèle et que j’ai le diable au corps.
J’espère avoir le temps de te demander comment tu as passé la nuit et de te remettre plusieurs lettres intéressantes. M^me Lockroy m’a fait savoir qu’elle ne dînait pas ce soir. Et moi je te fais savoir que de près, de loin, heureuse ou malheureuse, je t’adore.

BnF, Mss, NAF 16398, f. 338
Transcription de Guy Rosa

Notes

[1] Il a été convoqué en urgence, note Hugo, « pour une communication du gouvernement » -sans doute la déclaration de Mac-Mahon où il renonce à une seconde dissolution et reconnaît le primat du législatif : « La Constitution de 1875 a fondé une République parlementaire en établissant mon irresponsabilité, tandis qu’elle a institué la responsabilité solidaire et individuelle des ministres. Ainsi sont déterminés nos devoirs et nos droits respectifs. L’indépendance des ministres est la condition de leur responsabilité. Ces principes, tirés de la Constitution, sont ceux de mon gouvernement. » C’était désavouer sa lettre à J. Simon du 16 mai.

[2] Il a le portefeuille des Affaires étrangères dans le ministère Dufaure installé le jour même de cette lettre.