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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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2 février [1842], mercredi matin, 10 h. ½

Bonjour mon Toto chéri, bonjour mon amour adoré. Vous ne voulez plus décidément venir déjeuner avec moi ? Eh bien vous avez tort, car je vous donnerais de bonnes petites choses et je vous en ferais d’autres non moins bonnes. Décidément vous êtes un bête et moi une pauvre abandonnée et malheureuse.
Pauvre ange bien-aimé, c’est peut-être à cause de Mlle Hureau que tu n’es pas venu ? Mais mon pauvre amour il ne fallait pas me priver du plus grand bonheur de ma vie pour cela, puisqu’il s’agissait d’être levé à deux heures seulement. De toute façon tu es un petit bêtaa, et j’ai bien envie de te flanquer des bons baisers [en manière ?] de giffes tu ne les aurais pas voléesb. En attendant c’est toujours moi qui suis la DINDONNE de la chose et ça commence à finir par m’ennuyerc. Je voudrais changer de mystification, il me semble qu’il y aurait au moins le plaisir de la variété. À défaut d’autre j’aimerai peut-être celui-là. Baise-moi toujours et ne prolonge pasd ma patience jusqu’à l’impatience la plus poussée si tu ne veux pas en voir les effets sur ton nez.
Je voudrais [voir  ?] l’affaire de la pension terminée et bien terminée. C’est une [épreuve  ?] que j’ai depuis quinze jours et qui me tourmente beaucoup. Je donnerais tout au monde pour que l’enfant restee avec Mlle Hureau [1]. Enfin à la grâce de Dieu, c’est toujours à lui qu’il faut s’en remettre dans toute occasion.
Je t’aime de tout mon cœur mon Toto mais tu ne viens pas assez.

Juliette

BNF, mss, NAF 16348, f. 103-104
Transcription de Nicole Savy

a) « bêtat ».
b) « volé ».
c) « ennuier ».
d) « pas » répété par étourderie.


2 février [1842], mercredi soir, 8 h. ½

J’attends hélas que je ne t’aime plus [bien  ?]. Il paraît que j’attendrai longtemps et que je vous attendrai toujours [2]. Ce qui n’est pas très drôle, quoique vous en soyez un fort ennuyeuxa DROLE. Mais où êtes-vous, scélérat, pour que j’aille vous tirer un peu les oreilles ? Tenez je ne veux plus vous rien dire car vraiment je perds mon temps et ma peine. Taisez-vous.
Si Mlle Hureau ne venait pas aujourd’hui il n’en faudrait pas moins écrire à Mme Devilliers, parce que sa lettre est assez pressante pour ne pas différer plus longtemps d’y répondre.
Voici déjà [2  ?] jours que [je n’ai  ?] encore vu personne. Il paraît d’ailleurs que je suis vouée à attendre touteb espèce de gens et touteb espèce de chosesc, car pour moi rien ne vient à souhait. Taisez-vous vous êtes un académicien.
Comment vont les petits goistapious et surtout le petit enflé  ? Comment vont vos beuttes ? Vous font-elles toujours souffrir ? Si j’étais [méchante] je vous le souhaiterais, ce serait peut-être une manière de vous forcer à venir chez moi pour en changer. Vous le mériteriez bien pour vous apprendre à me laisser là dans mon coin comme un pauvre chien galeux. Mais je suis meilleure que vous et je ne veux pas de mon bonheur, merci, au prix d’une souffrance pour vous. Baisez-moi.

Juliette

BNF, mss, NAF 16348, f. 105-106
Transcription de Nicole Savy

a) « ennuieux ».
b) « tout ».
c) « chose ».

Notes

[1Il s’agit de sa fille Claire, dont Juliette souhaite le maintien auprès de sa maîtresse de pension préférée.

[2Comme dans la lettre de la veille au soir, écho inconscient de la même tirade de Doña Sol : « J’ai besoin de vous voir et de vous voir encore / Et de vous voir toujours ».

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