Guernesey, 19 mai 1860, samedi midi
Bonjour, cher bien-aimé, bonjour en vue de ta chère petite personne que je vois aller et venir dans son lucoot. Il y a déjà quelque temps que je suis levée, moi, et que j’ai fait beaucoup de chosesa dans ma maison. Si je ne t’ai pas écrit plus tôt c’est qu’il faut que j’envoie Suzanne de bonne heure marcher si je veux vous régaler demain, mon cher petit gueulard. Je n’aurais pas osé te demander ma chère petite lettre annuelle en te voyant si préoccupé de ton livre, mon doux adoré, mais je suis trop heureuse que de toi-même tu veuilles conserver cette pieuse tradition de notre amour pour t’en empêcher. Aussi j’y compte et je m’en fais ma vraie fête, ma seule, mon unique fête. Et bien que je l’espère, que j’y compte et je m’y attende, mon bonheur en la recevant sera une véritable SURPRISE pour mon cœur jamais blasé sur ce genre d’émotion. En attendant, mon cher adoré, je te souris à distance et je t’envoie à travers l’haleine du printemps tous les baisers de mon âme.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16381, f. 118
Transcription d’Amandine Chambard assistée de Florence Naugrette
a) « chose ».