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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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24 octobre [1836], lundi après midi, 2 h. ¼

Mon pauvre cher bijou, on dirait que le diable est dans notre bourse, à peine est-elle remplie qu’elle est vide, à peine est-elle vide qu’elle s’emplit de nouveau, mais Dieu sait à quel prix, calemboura à part, car je parle de ton repos et de ta chère santé. Quand donc serai-je une grande actrice ? C’est-à-dire une femme vivant honnêtement de son travail ? J’en désespère à présent, et cependant je me sens du courage et mieux que cela encore…
Lafabrègue mon cordonnier vient de venir m’apporter les pantoufles de Mme Guérard. Je les lui ai payées, bien entendu, mais tout cela diminue d’autant notre petit boursicot [1], en attendant que notre ruine s’achève demain. Mon cher petit Toto, je t’aime, je désire que mon absurde position ne t’éloigne pas de moi. Enfin je voudrais être tout à la fois indépendante et esclave, indépendante par un état qui me nourrisse et esclave de mon amour seulement, c’est-à-dire un pauvre chien léchant vos pieds.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16328, f. 70-71
Transcription de Claudia Cardona assistée de Florence Naugrette

a) « calembourg ».


24 octobre [1836], lundi soir, 5 h. ½

Mon cher petit homme chéri, je persiste dans mon mal de tête. Il est impossible d’être plus ridicule que je le suis avec mes maux de tous les jours, ce qui ne m’empêche pas de bien boire, bien manger et le reste…….… Cependant je souffre, c’est bien vrai.
La lampe est hors d’état de servir, il faut que je l’envoie demain chez Caruel. J’aurais voulu pouvoir y passer pour lui expliquer moi-même ce qui lui manque, mais pour cela, mon cher petit homme, il faut que vous y consentiez. D’ailleurs j’ai demain Mme Lanvin. Ainsi ce ne pourrait être que le soir où tu pourras me mener.
J’ai une peur affreuse que tu ne sois à Fourqueux [2], voilà bien des fois que j’en suis quitte pour la peur. Cependant comme il faut que tu y ailles un jour ou l’autre je suis toujours en droit de croire que c’est le jour d’aujourd’hui.
Mon bien petit homme bien aimé, je vous aime, et puis je vous aime. Ah ! mais [après  ? enfin  ?] je vous aime. C’est différent si vous êtes parti et si vous ne pensez pas à moi avec regret, vous êtes un affreux scélérat et je ne vous aimerai plus jamais de la vie ni des jours.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16328, f. 72-73
Transcription de Claudia Cardona assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Boursicot : Petite économies.

[2Hugo se rend régulièrement à Fourqueux, commune proche de Saint-Germain-en-Laye où sa famille est en villégiature.

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