Guernesey, 27 décembre 1868, dimanche matin, 8 h. ¼
Bonjour, mon cher bien-aimé, comment ta nuit ? La mienne very good et le reste à l’avenant. Je pense avec tristesse à ton rhume que ce temps hideux ne peut qu’augmenter à moins que tu n’aies l’attention de te calfeutrer chez toi bien chaudement. Mais ce n’est pas par le soin de ta santé que tu brilles, hélas ! Aussi je suis presque sûre que tu ne feras rien pour arrêter ton rhume ni pour le guérir plus vite. Cette pensée ne m’inspire aucune gaîté et je regarde tomber la pluie avec un redoublement de mélancolie. Il n’en n’est pas de même de mes GENSES [1] que les étrennes de Kesler font toutes guillerettes depuis hier au soir. C’est dans cette disposition d’esprit qu’elles vont à la messe, ce qui est une des bonnes manières d’adorer Dieu à défaut de sentiments plus élevés. Quant à moi, je l’adore dans toi et je suis sûre qu’il m’approuve et qu’il me bénit comme je te bénis.
BnF, Mss, NAF 16389, f. 355
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette