Paris, 1er mars [18]72, vendredi matin, 8 h.
Bonjour, mon cher bien-aimé, je t’aime, je te souris, je te bénis et je t’adore. Comment as-tu passé la nuit ? Bien, n’est-ce pas ? Et moi aussi j’ai bien dormi et je suis déjà levée depuis longtemps. Je viens de m’apercevoir que tu as oublié hier soir tes épreuves et je vais te les envoyer tout de suite, en même temps que deux oranges et deux petits grapillons de raisin pour Petite Jeanne qu’elle pourra partager avec Petit Georges pour peu que cela soit possible. Je n’ai pas pensé à te dire hier qu’Henriette me priait de faire remettre de sa part à sa mère 20 F. par madame Chenay si tu veux bien. Elle me prie en outre d’écrire à sa mère que l’air de Paris ne lui vaut rien et qu’elle désire s’en retourner à Guernesey d’ici un mois, soit avec nous, si nous y allons d’ici là, soit seule. Je lui ai promis que j’écrirais aujourd’hui même, n’entendant en aucune façon la garder malgré elle. Au point de vue de la douceur et de l’honnêteté ce sera une véritable perte pour moi. Quant au service, sa mauvaise santé l’annule de jour en jour. Mais quel sera celui qui lui succèdera ? That is the question. En attendant je me réconforte dans ton amour.
BnF, Mss, NAF 16393, f. 60
Transcription de Guy Rosa