Bruxelles, 24 juillet [18]67, mercredi, 8 h. ½ du m[atin]
Bonjour, mon tout bien-aimé. Bonjour, je t’aime, savez-vous ? Il y a aujourd’hui huit jours que nous quittions juste à la même heure notre chère petite île guernesiaise ; je ne le regrette pas puisque tu es heureux mais je ne serai pas fâchée quand nous y reviendrons. Certes, je suis heureuse partout où tu es mais mon lieu de prédilection, mon paradis entre tous, c’est toujours Guernesey. Tout cela ne me dit pas si tu as passé une bonne nuit et si tu m’aimes mais j’espère que tout est à souhait dans ta nuit et dans ton cœur comme dans les miens. Que dis-tu de ce temps ? Yes, very well, my deara. Je crains que notre promenade au bois de la Cambre [1] ne soit fort aventurée. Pourvu encore que tu puisses venir me retrouver pas trop tard ce soir aux galeries Saint-Hubert [2]. J’ai beau me battre les flancs pour tuer le temps et me persuader que je m’amuse sans toi, je n’y parviens pas. Aussi tu serais bien gentil de venir prendre ta part de la Grande Duchesse [3] le plus tôt possible ce soir.
En attendant, je fais de mon mieux pour t’attendre avec courage et avec patience. Pour cela, je t’aime, je t’aime, je t’aime.
BnF, Mss, NAF 16388, f. 196
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
a) « ies, wery wel, my deare ».