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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Jersey, 7 janvier 1855, dimanche après-midi, 3 h.

Cher petit homme, il est probable que tu ne viens pas parce que tu me crois en proie aux Préveraud tandis que je t’attends seule ici ; voici pourquoi. Depuis longtemps les petits Préveraud et le citoyen Durand étaient invités chez M. Charrassin. Il paraît qu’hier il les a mis en demeure de venir dîner aujourd’hui dimanche chez lui. Cela étant, le jeune Préveraud est venu m’en prévenir hier en me priant d’ajourner la visite à leur maison, ce à quoi il ne m’a pas été difficile de consentir comme tu penses bien. La seule chose que je n’accepte jamais si facilement, c’est de ne pas te voir à tous les instants de la journée. Aussi je bisque de toutes mes forces en songeant que tu restes chez toi peut-être sans nécessité, pendant que je te désire ici avec impatience. Du reste, je crois que vous n’êtes pas revenu hier au soir, car je n’ai entendu ni le son de votre chère petite voix ni le bruit de votre pas et je ne me suis couchée qu’à neuf heures et demi et n’ai soufflé ma bougie qu’à 10 h. De tout cela il résulte que voilà bien longtemps que je ne vous ai vu et que je suis très malheureuse. Je m’en venge en vous aimant par-dessus les bords, en élargissant mon cœur à l’égal de l’infini et en multipliant mon âme en autant d’étoiles qu’il y en a au ciel et que je remplis de l’amour de mon amour. Vous vous passeriez très bien de cette surabondance de tendresse et d’adoration mais moi je n’en aia que juste mon nécessaire. Prenez-en donc votre partie vaillamment, mon cher petit Toto, et tâchez de ne pas me faire languir plus longtemps. D’ailleurs nous avons à parler d’affaires ensemble vu le besoin le plus urgent d’argent pour le loyer de Paris et les reconnaissances, plus la dépense de ma maison, le loyer d’ici et les gages de Suzanne, tout cela immédiatement nécessaire. Allons, monb cher petit Toto, un peu de courage au cœur et d’embêtement à la poche, s’il vous plaît.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16376, f. 13-14
Transcription de Magali Vaugier assistée de Guy Rosa

a) « n’en n’ai ».
b) « mon mon ».

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