Guernesey, 20 fév[rier] [18]63, vendredi soir, 5 h. du so[ir]
Cher adoré, je t’attends, je te désire, je t’espère et je t’aime avec un redoublement d’ardeur qui mérite une récompense prompte et telle que mon cœur la souhaite, est-ce que tu ne vas pas me l’apporter bien vite ? J’ai beau faire de la patience avec mon impatience cela ne constitue pas un bonheur bien vif pour toute une journée de solitude. Déjà hier je t’ai à peine entrevu quelques minutes, je ne me plains pas mais je suis triste. Je sens que je ne pourrai reprendre courage qu’en te voyant. Dépêche-toi donc de venir, mon doux bien-aimé, pour que je sois GEAIE comme un chien et heureuse comme un loup. En attendant je regarde mon petit chat à l’affût des petits oiseaux dans mon prunier et mon coq qui marivaude avec les cocottes avant d’aller se coucher. Tout cela serait doux et charmant à voir si tu étais là pour les regarder avec moi, mais pour moi seule c’est moins que rien. Ah ! Dieu te voilà, quel bonheur !
BnF, Mss, NAF, 16384, f. 46
Transcription de Chantal Brière