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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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4 décembre [1844], mercredi matin, 11 h. ½

Oui, mon Toto je serais très heureuse si je pouvais espérer te voir tout de suite et passer le reste de la journée avec toi. Mais la chose est si peu probable que je me crois le droit d’être un peu mouzon. Je ne sais pas comment vous faites votre compte mais vous trouvez toujours le moyen de rester chez vous quand il y a des FAUMES. Jamais vous ne manquez ces occasions-là. Ce n’est pas d’hier que j’ai fait cette remarque, croyez-le bien, c’est ce qui m’autorise à croire que vous n’êtes pas occupé pour tout le monde de travaux sérieux et absorbants. Je crois que vous me réservez pour moi seule la correction des épreuves, la correspondance, l’Institut, les visites au chancelier, les (CONTES ?) de Bernard et autres improvisations du même genre. Je ne vous remercie pas de votre aimable préférence, vilain monstre. Taisez-vous. J’ai rêvé cette nuit que je flanquais une pile soignée à votre CRÉOLE [1]. J’espère bien ne pas m’arrêter là et continuer ces exécutions NOCTURNES le jour. Quand j’en aurai bien rossé trois ou quatre aua grand jour les autres se tiendront tranquilles pendant quelque temps ce qui me permettra peut-être de vous voir un peu plus de cinq minutes par jour. J’essaieraib toujours. En attendant baisez-moi mon cher petit scélérat et prenez garde à vous. C’est aujourd’hui qu’on m’apporte ma belle lampe ! Pauvre cher adoré, je te remercie du fond du cœur. Tu ne me laissesc rien désirer, tu vas au devant de tout ce dont j’ai besoin. Malheureusement tous tes soins tout ton dévouement ne peuvent combler le vide qu’un seul de tes baisers fait dans mon cœur quand il manque à ma bouche.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16357, f. 123-124
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette


a) « aux ».
b) « esseairai ».
c) « laisse ».


4 décembre [1844], mercredi soir, 6 h. ¾

Je vous écris à la lueur de mon gaz, c’est charmant. Seulement je regrette de n’avoir pu l’inaugurer en votre auguste présence. J’ai attendu jusqu’à présent, espérant que vous viendriez jouir du coup d’œil, mais je vois que je me suis trompée. Cher bien-aimé adoré, tout m’est un motif pour te désirer et pour t’attendre le plus tôt possible. Malheureusement ton loisir ne répond pas souvent à mon impatience et à mon amour. Je te dis cela tout doucement pour soulager un peu mon pauvre cœur mais sans espoir de te faire venir plus vite car je sais que tu ne le peux pas. Le marchand de lampe est venu à 1 h. Il m’a montré la manière de me servir de sa mécanique. C’est très simple quoique cela demande encore beaucoup de soin et de propreté. Dans le cas où le Duchatel voisin ne voudrait pas vendre de liquide on n’aurait qu’à lui écrire un mot pour en avoir un bidon de 25 litres. Cela ne peut pas s’éventer cela ne peut que s’évaporer si on le tient débouché mais la qualité n’en est pas altérée. Ce n’est donc que du soin à avoir et comme ce sera moi qui ferai la chose il n’y a aucun danger. Merci mon Victor, merci mon amour tu m’as donné une excellente chose. Il me semble que cette lumière est douce aux yeux. Ce soir il me semble que j’ai les yeux dans du velours. Vrai, cette lumière a quelque chose de doux et de bienfaisant qui fait plaisir. Je te remercie encore une fois, mon Toto, et je t’aime de tout mon cœur.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16357, f. 125-126
Transcription d’Yves Debroise assisté de Florence Naugrette

Notes

[1La Créole en question est Fortunée Hamelin, ancienne merveilleuse du Directoire que Hugo a rencontrée chez Léonie Biard (circonstance ignorée de Juliette).

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