3 h. du matin
Il m’est impossible de dormir – Je pense à ta soirée d’hier et je tremble pour notre amour – Puisque tu as pu y rester assez longtemps pour ne pouvoir pas revenir me voir – c’est que tu y as éprouvé du plaisir, c’est que tes yeux et ton esprit ont été agréablement occupés et tu as oublié la femme qui t’aime et qui t’attendait avec tant d’impatience – S’il en était ainsi, il ne faudrait pas me tromper, vois-tu, ce serait lâche et déloyal à toi d’abuser de ma confiance et de mon amour –––a
Oh ! mais je suis folle, tu m’aimes, tu n’aimes que moi – tu n’auras pas pu revenir – tu en auras souffert autant que moi – tu t’es ennuyé dans ce monde où je n’étais pas – Tu ne penses qu’à moi de loin ou de près, éveillé ou endormi. Tu ne penses qu’à moi – n’est-il pas vrai ? Pardonne-moi les folles paroles que je t’ai écritesb plus haut – Pardonne-moi de t’aimer au point d’être injuste et égoïste – Pardonne-moi et aime-moi comme je t’aime, de toute ton âme.
Juliette
Je vais tâcher de dormir. Si j’étais ma maîtresse j’irais me promener, je sais bien où.
[Adresse]
Pr toi, toujours
BnF, Mss, NAF 16322, f. 185-186
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette
[Souchon]
a) Trois longs traits courent jusqu’au bout de la ligne.
b) « écris ».