Guernesey, 13 mai 1858, jeudi, 3 h. après-midi
Si tu avais été prêt pour ton manuscrit, mon cher bien aimé, j’aurais pu commencer à COPIRE aujourd’hui malgré la date fatidique du jour [1]. Malheureusement tu as toujours plus de chien à fouetter qu’il n’y a d’heure dans une journée et je prévois que nous arriverons au moment de la publication sans avoir une ligne copiée devant nous, ce qui ne sera commode pour personne. En attendant, je ne me lasse pas de crier dans mon désert : mon cher petit Toto, donne-moi à copire [2] ou la mort ! Tant pire pour moi si vous ne m’écoutez pas. À propos, Marquand vient de rapporter le fameux 80 [3] qui était tombé dans ses chausses à ce qu’il paraît, le vilain sale. Je parle du numéro. Seulement je regrette puisqu’il s’en était aperçu hier au soir, qu’il ne me l’ait pas [renvoyé ?] par la servante ce matin, il m’aurait épargné un peu d’ennui et beaucoup de fatigue inutile. Enfin le voilà retrouvé, ce fameux quatre vingt. Tout est pour le mieux et la régularité de mon loto reprend toute son intégrale majesté. Que votre puddinga à la rhubarbe soit réussi ce soir et que cela face plaisir à la TABLE. Je n’en demande pas davantage. Ah ! pardon, je demande MES DEUX INDIENS [4] qui ont dû arriver ce matin POUR MOI, de Saint-Malo, en même temps que votre chimérique cuisinière [5].
BnF, Mss, NAF 16379, f. 103
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette
a) « pudings ».