Guernesey, 25 février 1858, jeudi soir, 6 h.
C’est bien vrai que je t’aime, c’est bien vrai que je t’admire, c’est bien vrai que je te vénère, c’est bien vrai que je t’adore mon bon, mon sublime, mon ineffable et divin bien-aimé. Si tu pouvais voir mon âme tu saurais à quel point je t’aime d’un amour tendre, passionné, et religieux. Pauvre bien-aimé, prends garde d’éterniser ton rhume en t’exposant ce soir au grand froid sans précaution, il m’a paru que tu n’étais pas assez couvert. Je t’ai rappelé pour te faire prendre ton petit paletot de dessous mais la crainte de te faire attendre chez Duverdier et le désir d’être beau pour les personnes du sexe font que tu n’as pas voulu revenir sur tes pas. Pourvu que tu ne paie pas trop cher ton impatience et ta coquetterie de rasoir ce soir, c’est tout ce que je demande en te priant de revenir le plus tôt possible. En attendant, je t’aime de toutes mes forces.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16379, f. 43
Transcription d’Anne-Sophie Lancel assistée de Florence Naugrette