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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 4 juillet [18]73, vendredi matin, 5 h. ¾

Cher bien-aimé, mon cœur pelotte [1] en attendant l’heure de te voir, laquelle ne sonnera officiellement que dans une heure. Quant à toi, mon adoré, tâche de dormir la grasse matinée car tu as encore beaucoup de sommeil à rattrapera avant d’être au pair avec le citoyen MORPHÉE. Je viens de m’apercevoir que tu as remis à ma Sainte et digne garde une assez grosse partie de ton manuscrit QUATREVINGT-TREIZE mais je n’ose pas y toucher avant ta permission. Suzanne qui te portera à neuf heures la petite partie collationnée te priera de ma part de dire ce qu’il faut que je fasse. Au reste je t’expliquerai la chose par un petit mot AD HOC ce qui me permettra d’y glisser quelques unes des bonnes tendresses dont je suis toute gonflée. J’ai encore un peu mal dormi, cela tient je crois un peu à la température et beaucoup à la tension de la pensée et du cœur tournés du côté de l’horizon où sont tes enfants. Une fois qu’ils seront ici, la vie, l’air et le sommeil nous serontb légers parce que nous n’aurons plus rien à désirer que la continuation de notre bonheur. En attendant je t’adore.

BnF, Mss, NAF 16394, f. 200
Transcription de Manon Da Costa assistée de Florence Naugrette

a)« rattrapper ».
b)« serons ».


Guernesey, 4 juillet [18]73, vendredi matin, 7 h. ¾

Je t’ai encore manqué, mon cher bien aimé, mais cela n’importe qu’à moi, l’essentiel est que tu aies passé une bonne nuit comme je le désire et comme je l’espère. En attendant que mon espoir se confirme, je t’envoie mon plus tendre bonjour, plus la première partie de ton manuscrit collationnée hier. À ce propos je crois que tu as oublié que tu as déposé chez moi tout ton manuscrit ou au moins une forte partie à laquelle je ne veux toucher que sur ton ordre, ce qu’il te sera facile de me faire savoir par Suzanne séance tenante. En attendant je t’envoie ce qui a été vérifié hier, plus Le Rappel contenant l’interdiction de Le Roi s’amuse [2]. La chose en effet est assez étrange et assez odieuse pour être gardée pour l’enseignement à venir du peuple français. En attendant je t’adore, voilà mon opinion politique et littéraire.

BnF, Mss, NAF 16394, f. 201
Transcription de Manon Da Costa assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Utilisation du verbe propre à Juliette.

[2Drame historique de Hugo, joué pour la première fois en 1832. Il fut interdit le lendemain de sa première pour trouble à l’ordre public. Il devait être rejoué à l’occasion de la réouverture du théâtre de la Porte Saint-Martin en 1873, mais subit une nouvelle fois la censure le 2 juillet, avant même d’avoir été programmé.

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