Guernesey, 23 juin [18]73, lundi matin, 7 h.
Cher adoré, je constate que tu n’es pas encore levé, ce qui ne m’étonne pas après les nuits et les jours très agités que tu viens de passer ; mais j’ai le regret de ne pouvoir pas prendre le temps de guetter ton passage à cause des diverses choses qu’il faut que j’entasse d’ici à midi avant d’aller déjeuner chez toi. Cependant j’ai, toutesa affaires cessantes, besoin d’épancher le trop plein de mon admiration sur ton Quatrevingt-Treize ! Que c’est grand, que c’est beau, que c’est terrible, que c’est bon, que c’est doux et charmant, que c’est sublime ! Les mots de la langue humaine ne suffisent pas pour louer ce nouveau chef-d’œuvre qui, par un mirage toujours renouveléb chaque fois que tu fais un nouveau livre, semble dépasser tous les autres. Ce mirage je l’éprouve encore cette fois plus grand si c’est possible et ma pensée, mon cœur, mon âme s’abîment dans une adoration infinie comme ton génie.
BnF, Mss, NAF 16394, f. 189
Transcription de Maggy Lecomte et Manon Da Costa assistées de Florence Naugrette
a) « tout ».
b) « renouvellé ».