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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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17 mai 1836

17 mai [1836], mardi matin, 11 h.

Bonjour, mon cher adoré. Je t’aime, et toi ? Je ne t’ai pas écrit ce matin à 8 h. parce que je voulais me rendormir mais je t’ai aimé de toute mon âme. J’avais fait mettre le petit chat auprès de moi qui a été très sage. Dans ce moment-ci il joue avec beaucoup de grâce.
Que je vous aime, mon Toto : il y a pourtant une chose qui m’inquiète quoi que vous en disiez. C’est le besoin nouveau de voir les chefs-d’œuvre de M. Duvert [1] et autres. J’ai beau faire, je ne trouve qu’une seule raison pour cette aberration subite et cette raison n’est pas la meilleure qui se puisse trouver pour dissiper l’épais nuage noir qui est sur mon Soleil. Certainement, j’ai toujours foi en ta loyauté, je ne suis pas sans m’apercevoira des efforts incroyables que tu fais si généreusement pour me délivrer du poids de ma vie passée, mais je crois que tous les sentiments honnêtes et généreux n’empêcheront pas un homme de se lasser d’une liaison de trois ans et plus et d’éprouver à son insub le besoin d’en changer. Si cela était, mon cher Victor, je te prie d’avoir la franchise de me le dire. Avec mac manière de voir et de sentir c’est le dernier procédé vraiment délicat que j’apprécierais de toi. Si cela n’est pas, dis-le moi encore pour que je reprenne confiance et sécurité. Mon amour est et sera toujours à toi, quoi que tu fasses.

J.

BnF, Mss, NAF 16327, f. 59-60
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette
[Massin]

a) « appercevoir ».
b) « insçu ».
c) « ma » en fin de ligne est répété par erreur à la ligne suivante.


17 mai [1836], mardi soir, 8 h.

Je vous écris sur pied, mon cher adoré, je vous écris que je vous aime dans toutes les positions du corps et de la vie : à pied et à cheval et même au lit. Heureuse ou malheureuse, je vous aime. Vous avez été bien injuste tout à l’heure quand vous m’avez dit que je n’étais pas joyeuse de souper avec vous tandis qu’au contraire je suis très contente et très GEAIEa. Vous êtes donc parfaitement dans l’erreur et vous le méritez à tous égards. Maintenant je vous engage à avoir un peu de sollicitude pour la bonne chère car notre cuisine ne promet pas grand-chose et ne tiendra pas davantage. Ainsi je vous recommande de faire de vos poches un buffet suffisamment garni.
Je vous aime, mon amour. J’avais un gros chat noir depuis hier qui me pesait sur la poitrine comme un cauchemarb, mais qui commence cependant à s’en aller petit à petit grâce à votre joliec petite figure rieuse et sincère. Ce soir, je serai très gaie, très aimable et très charmante. C’est le petit chat. Et je MANGERAI tout excepté les pâtés que je fais sur mon papierd. A bientôt, mon cher adoré. Oh ! je t’aime, VA.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16327, f. 61-62
Transcription d’Isabelle Korda assistée de Florence Naugrette

a) « GEAI ».
b) « cochemar ».
c) « joli ».
d) En effet, à cet endroit, petits pâtés.

Notes

[1Félix-Auguste Duvert : vaudevilliste, coauteur avec Dupeuty d’une parodie d’Angelo, Cornaro, tyran pas doux, créée le 18 mai 1835 au Théâtre du Vaudeville. Le 19 mars 1836, au Théâtre du Palais-Royal, est créée la farce Actéon et le centaure Chiron, dont il est l’auteur avec Théaulon et Leuven.

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