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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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Guernesey, 27 janvier [18]73, lundi matin, 8 h. ½

Je suis heureuse mon bien-aimé, je t’ai vu et bien vu, cette fois, et je te remercie de ta bonne petite télégraphie dont je n’ai pas perdu un seul geste. Autrefois, mon adoré, mon bonheur se doublait par la possibilité de te répondre dans le même langage ; le voisinage plus rapproché encore me le permettait ; mais maintenant les voisins et les passants m’empêchent de me montrer, ce dont j’enrage tous les jours en regrettant ma petite maisonnette solitaire d’où j’entendais ta voix et d’où je pouvais te voir à tous les instants. C’est le cas de dire le proverbe : le mieux est l’ennemi du bien.
Je viens d’envoyer Suzanne porter ton déjeuner et réclamer une layette pour la pauvre accouchée mais Mariette en avait déjà porté une samedi. La femme se nomme [Michet / Richet / Michot / Richot  ?] et un de ses six enfants est le petit garçon de trois ans que tu trouves si farce avec ses belles bottes, la belle dame et la belle choppe !
« Qui donne aux pauvres prête à Dieu ». Quand donc Dieu te donnera-t-il un acompte de bonheur paternel pour tout le bien que tu fais aux petits enfants et à tous ceux qui souffrent ? À défaut d’huissier pour lui rappeler la dette sans cesse grossissante qu’il te doit, ma prière ardente le somme tous les jours de t’en payer au moins les intérêts par quelques [vraies  ?] joies dont ton cher Petit Georges et ta chère Petite Jeanne seraient la monnaie. Jusqu’à présent il a l’air de faire la sourde oreille, peut-être n’attend-t-il si longtemps que pour te payer tout à la fois. Je l’espère et je redouble de prière et de confiance en lui, le solvable infini et le juste absolu. Le soleil de ce matin est déjà d’un bon augure. Attendons et aimons nous comme si nous étions déjà au ciel.

BnF, Mss, NAF 16394, f. 26
Transcription de Maggy Lecomte assistée de Florence Naugrette

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