Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1877 > Mai > 22

22 mai 1877

Paris, 22 mai [18]77, mardi matin, 10 h. ½

Dites doncque, citoyllien, il me semble que vous prenez goût aux empereurs [1] ? Mais soylliez tranquille je veille au grain et je garde mes armes. Eh bien, redites doncque, si c’est comme ça que vous découragez les portes-couronnes, vous êtes encore un fier démagogue, vous ! Heureusement qu’il y a encore des guillotines au service de la République et j’en userai, je ne te dis que ça ; mets-le dans ton journal ! Et dire qu’il va falloir héberger ce César brésilien comme un simple homme ! Vrai, c’est à se mettre les cinq doigts et le pouce dans l’œil pour ne pas voir ce spectacle écœurant, abrutissant et navrant. Oh ! là là là qué malheur ! Heureusement que j’ai pu vous pincer un honnête autographe hier, qui est mon honneur, ma gloire et mon bonheur, avant votre abjection d’aujourd’hui. Je ne sais vraiment pas comment je m’y serais prise pour le lire et pour le baiser comme je l’ai fait, même avec le secours des pincettes. C’est égal, vous êtes un fier gueux [2] et votre empereur aussi.

BnF, Mss, NAF 16398, f. 138
Transcription de Guy Rosa
[Blewer]

Notes

[1Dans sa lettre du 16 mai, adressée sans doute à l’un des collaborateurs de Don Pedro, empereur du Brésil plutôt qu’à l’empereur lui-même, Hugo regrette de n’avoir pu participer à une circonstance où il aurait rencontré l’empereur, « cet homme rare, si préoccupé de toutes les idées du progrès et de la civilisation, ce grave et magnanime esprit, cet empereur qui honore le trône et son siècle, cet homme qui est plus qu’un prince puisqu’il est un esprit. » Hugo reçoit finalement l’empereur le 22 mai, puis, à dîner chez lui, le 29. Ses notes (Carnets, albums, journaux, CFL, t. XV-XVI/2, p. 894-895) contiennent le récit développé de ces deux rencontres où l’empereur du Brésil l’emporte largement dans l’assaut d’amabilités.

[2« Vous êtes un fier gueux » est la réplique finale de l’acte IV de Ruy Blas. Don César l’adresse à don Salluste qui vient de le faire arrêter par un vil subterfuge.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne