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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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16 juin 1877

Paris, 16 juin [18]77, samedi soir, 3 h.

Pour la première fois, mon pauvre grand bien-aimé, j’ai senti mes forces au-dessous de mon amour, aussi en suis-je désespérée. Depuis que je t’ai laissé partir sans moi, je ne sais plus que devenir, je souffre, je pleure, je t’aime et je t’adore sans pouvoir me calmer ni me consoler. Je me reproche de ne t’avoir pas accompagné au risque d’être un embarras pour toi. Enfin, je suis si malheureuse que, si je ne craignais pas de troubler cruellement ta vie tant de fois éprouvée déjà, je jetterais le manche après la cognée pour me débarrasser une fois pour toutes de mon humiliante inutilité. Quand je pense que tu es peut-être en danger, sinon de la vie, de la liberté et que je ne suis pas auprès de toi, il me prend des envies folles d’aller te retrouver à Versailles [1]. Mon Dieu, pourquoi n’y suis-je pas allée avec toi ce matin ? Je ne souffrirais que de mon corps au lieu de souffrir de mon cœur et de mon âme.

BnF, Mss, NAF 16398, f. 161
Transcription de Guy Rosa
[Souchon, Massin]

Notes

[1La circonstance en valait la peine. C’est ce jour-là, jour de la rentrée des deux Chambres ajournées depuis un mois, que Mac-Mahon demande au Sénat son « avis conforme » constitutionnellement requis pour la dissolution de la Chambre. La discussion, dans les « bureaux » (équivalent de nos commissions) puis en séance plénière dure jusqu’au 22 juin, où la demande de dissolution est acceptée de justesse (149 voix contre 130).

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