Paris, 4 avril 1880, dimanche soir, 5 h.
Je ne pense pas, mon grand petit homme, qu’il soit possible de songer à faire même une promenade d’une heure par ce temps d’orage et d’averses continuesa. Aussi j’en prends mon parti pour me mettre au pair avec les nouvelles de Paris et autre, comme dit le bon Lesclide, que j’ignore absolument depuis deux jours. Quant à mes comptes, je me suis aperçue hier que je m’étais trompée en copiant les chiffres de la recette. Erreur causée par un excès de fatigue ou défaut d’attention de ta manière d’écrire avec la mienne. Ce qui m’oblige à recommencer en tenant compte de la différence, non des sommes accusées, qui restenta les mêmes dans tous les cas, mais dont l’alignement est incorrect. Aujourd’hui je me sentais trop énervée pour les reprendre à nouveau, les comptes, mais demain je les achèverai, je l’espère. Je vais aller voir si tu renoncesc définitivement à notre promenade. Hélas ! Voilà le temps gâté peut-être pour longtemps, je le crains. Il est vrai que ce qui semble mauvais pour notre plaisir est un bienfait général pour les productions de la terre. Consolons-nous par cette compensation à venir et pour nous conformer aux leçons du citoyen Azaïs [1]. Cher, cher, cher bien-aimé, je me sens encore plus bête et plus ennuyeuse que de coutume est-ce folie, est-ce Pologne, est-ce pluie [2] ? Chi lo sa [3] ? Mais je t’adore.
[Adresse]
Monsieur Victor Hugo
BnF, Mss, NAF 16401, f. 94
Transcription de Blandine Bourdy et Claire Josselin
a) « continue ».
b) « reste ».
c) « renonce ».