15 décembre [1849], samedi soir, 10 h. ½
Toujours de la même Juju à son même Toto, et cela jusqu’à la mort de la susdite Juju. Ah ! vous avez fait mine de regretter mes gribouillis ! Ah ! vous avez fait semblant d’y tenir ! Ah ! vous vous fichez de moi ! Eh ! bien c’est vous qui la gobez pour le quart d’heure. Cela vous apprendra à ne pas vous ficher de moi et à ne pas vous maniérer. En attendant soyez puni par où vous avez péché, c’est bien fait. Taisez-vous monstre d’homme et prenez garde à la rue Neuve des Martyrs et à ses habitantes [1]. Je sais bien qu’il faut au sultan des sultanes, il faut des perles au poignard [2]. Mais prenez garde que ma bonne lame ne prenne votre bedaine en guise d’ornement et de gaine. La rime y est et je vous la donne par-dessus le marché à la condition que vous me direz toutes les Poléma, toutes les Olympea, toutes les Rebecca [3] et toutes les Rachel qui vous passeront sous le ventre. Je tiens à ces renseignements. C’est de la statistique rien de plus. Le reste viendra de soi-même et sans efforts. Voime, voime, scélérat, polisson, infâme gueux, tâche de ne pas t’y fier si tu tiens à la vie et à tout ce qui en dépend. Je ne ris pas moi et tu ne le verras que trop bien plus tard. En attendant, je te conseille de croquer un peu moins de poulettes et de manger un peu plus de poulet, surtout ce soir où tu dois avoir une faim de chien errant. Ne joue pas avec ton estomac et avec ta santé, ne te moque pas de ta pauvre Juju et de son amour.
BnF, Mss, NAF 16367, f. 355-356
Transcription d’Anne Kieffer assistée de Jean-Marc Hovasse
a) « Olympes ».