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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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20 octobre [1845], lundi matin, 8 h. ¾

Bonjour, mon Toto bien aimé, bonjour, mon cher petit homme adoré, bonjour, comment vas-tu ce matin ? Bien occupé déjà probablement ? Que ne puis-je t’aider ! Avec quelle joie, quel empressement et quelle ardeura je le ferais. Tu aurais dû me prendre à la journée, je t’assure que tu n’y aurais pas perdu....b autre chose que quelques petites épluchures par-ci, par-là. Mais vous m’avez dédaignée, tant pire pour vous. Vous voyez ce qu’il vous en coûte de temps perdu, de poussière avalée, de fatigue et d’ennui. Vous n’êtes pas revenu hier, vilain méchant, c’est très mal et très féroce à vous, car vous n’ignorez pas le chagrin que me fait chaque nouvelle déception causée par vous. Cela fait que je vous crois de moins en moins et que je n’ajoute aucune foi en vos promesses. Taisez-vous, vilain attrapeurc de femmes.
Bonjour, mon Toto chéri, je tâche d’être geaie mais je ne parviens qu’à être un NIbou fort maussade. Si je vous avais revu hier au soir, j’aurais été comme un pinsond ce matin, tandis que si vous ne venez pas bientôt, il me sera impossible de n’être pas une pauvre OIE sans canarde... littéraires. Avec tout ça, je vous aime comme un chien.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16361, f. 59-60
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « quel ardeur ».
b) Quatre points de suspensions.
c) « attrappeur ».
d) « pinçon ».
e) « sans canards ».


20 octobre [1845], lundi après-midi, 4 h. ¼

Je viens de m’apercevoir que j’avais pris mon papier à l’envers et je l’ai courageusement retourné pendant qu’il en était encore tempsa.
Cher adoré, je ne te vois pas longtemps à la fois et je ne te vois pas souvent, mais le peu que je te vois est un grand bonheur et une grande joie pour moi. Je pense avec tristesse que bientôt ces courts et ces rares instants vont encore devenir plus courts et plus rares dès que ton monde sera installé à Paris [1]. Alors je ne sais pas ce que je deviendrai. Cependant je ne veux pas te tourmenter à l’avance et même jamais, j’en ai pris la ferme résolution, quand je devrais en crever dans ma peau de Juju. J’espère que je pourrai marcher ce soir, quoique mon pied me tourmente beaucoup dans ce moment-ci. Mais je veux aller avec toi absolument et je ne tiendrai aucun compte du mal qu’il me fera ou que je lui ferai, car je ne sais pas au juste lequel de nous deux fait du tort à l’autre. En attendant, je le mets en écharpe le plus que je peux.
Cher petit homme coquet, vous voyez ce que c’est qu’un nettoyageb de maison depuis deux ou trois jours et vous savez combien il est difficile de conserver la splendeur des mains blanches et des ongles roses dans un pareil travail, et encore vous n’êtes que directeur dans la chose tandis que moi je joue le premier rôle de balayeuse en chef. Tâchez de ne pas trop vous fatiguer à ce métier peu récréatif et de ne pas venir trop tard. Je baise la sacrée poussière de votre petite carcasse adorée.

BnF, Mss, NAF 16361, f. 61-62
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) On peut lire la date écrite à l’envers au bas de la page.
b) « un nétoyage ».

Notes

[1La famille de Victor Hugo séjourne à la campagne à Saint-James depuis le 12 septembre. Le séjour prend fin le 21 octobre, date du retour à Paris.

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