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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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29 juillet [1842], vendredi après-midi, 4 h.

C’est comme ça que vous me récompensez de mes peines, vieux scélérat, après que je vous ai pansé toutes vos manadies [1], voilà le remerciement [illis.] polisson viens frotter tes gales et tes ex-votos auprès de moi, tu verras de quel manche à balai je retournerai sur ton dos d’académicien. Je ne te dis que ça en passant. En attendant, voici la fameuse lithographie [dessina] qui vous fera passer de vie à trépas dans la dernière des postérités. En attendant je veux que vous marchiez droit et que vous ne soyez pas si galant avec Mamzelle Rabut et que vous ne lui donniez pas vot’chose tout d’abord quand moi j’ai tant de peine à en avoir un petit morceau toutes les trois semaines. Je ne suis pas fâchée d’avoir une espèce de mouchard dans ma manche. De cette façon je saurai un peu ce qui se passera entre vous et les diverses tartempiones qui vous font la cour. Tenez vous pour averti et songez à mon grand sabre tout frais rémoulu et dont je saurai mieux me servir que ne l’a fait le prince d’Orange passant par Namur.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16349, f. 301-302
Transcription d’Ophélie Marien assistée de Florence Naugrette

a) Dessin :

© Bibliothèque Nationale de France

29 juillet [1842], vendredi après-midi, 4 h. ¼

Le temps s’est remis au beau et si vous l’aviez voulu, mon amour, j’aurais pu en profiter. Mais vous n’êtes pas homme à me faire deux bonheurs en un jour, c’est bien assez pour vous de m’en faire un tout petit de temps en temps. Si je crève de gras fondu ou d’apoplexie foudroyante, vous ne serez pas très surpris puisque que vous aurez fait pendant neuf ans tout ce qu’il faut pour ça. Taisez-vous, allez, tout ce que vous direz et rien, ce sera la même chose. J’aime mieux une bonne sortie qui me donne la santé et la joie, qu’une mauvaise saison qui me verrouille chez moi, avec le mal de tête et la tristesse. Et puis si vous aviez un peu de réflexion, mon Toto, vous sauriez qu’il est nécessaire pour ma fille et pour les maîtresses de la pension que je me montre quelques fois et le plus souvent possible même. Cependant mon Toto vous êtes bon et dévoué, vous me donnez le plus pur de votre sang, le repos de vos nuits et vous ne voulez pas me donner une heure par jour pour ma santé et pour l’intérêt de ma fille. À quoi cela tient-il ? Nul ne le sait que vous, mais je rabâche toujours la même chose, mon pauvre bien-aimé, sans succès, il vaut donc mieux que je me taise. J’aurai pour moi la chance de ne pas vous ennuyer. Baise-moi mon Toto chéri, je t’aime de toute mon âme.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16349, f. 303-304
Transcription d’Ophélie Marien assistée de Florence Naugrette

Notes

[1Déformation volontaire de « maladies ».

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