Université de Rouen
Cérédi - Centre d'étude et de recherche Editer-Interpréter
IRIHS - Institut de Rechercher Interdisciplinaire Homme Société
Université Paris-Sorbonne
CELLF
Obvil

Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

Accueil > Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo > 1845 > Août > 21

21 août [1845], jeudi matin, 7 h. ½

Bonjour, mon petit Toto bien-aimé, bonjour, mon cher amour adoré, bonjour, comment que ça va ce matin ? Bien, n’est-ce pas ? Je te verrai tantôt, je l’espère ? En attendant, je trouve mon papier bien trop petit. Je ne veux pas me rogner à moi-même la portion de bonheur que j’ai à vous écrire, c’est déjà bien trop que vous m’ayez mise à la portion congrue. Quand vous m’écrivez, je ne veux pas être votre complice pour ce qui me regarde personnellement. Aussi j’irai peut-être tantôt achetera du papier du plus grand format que je trouverai. Je me fiche du satinage. Ce n’est pas à la qualité que je regarde, c’est à la quantité. Quand vous viendrez, je vous demanderai la permission de sortir pour cet achat. D’ailleurs il y a nécessité parce que le papier coûte juste le double plus cher et que j’en use beaucoup, ayant l’habitude de tout faire dans ma maison par correspondance. Tout à l’heure je vais écrire à Brest pour leur donner avis de l’envoi du panier. Je crains fort en effet que ces pauvres abricots, partis sains et saufs de Paris, n’arriventb à Brest à l’état de marmelade, ce qui serait humiliant pour des abricots nés natifs de Paris. L’intention était bonne, ce n’est pas de ma faute si mes agents sont stupides. Baise-moi, mon Toto, je t’aime. Je n’ai pas encore lu TEVERINO [1]. Je ne le lirai que si tu me donnes deux sous par numéro et des baisers à INDISCRÉTION.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16360, f. 174-175
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « acheté ».
b) « n’arivent ».


21 aoûta [1845], jeudi soir, 6 h. ¾

Mon Toto bien-aimé, mon toujours plus adoré petit homme, tu es beau, je t’aime. Ce n’est pas pour mécontenter la providence que je dis souvent que nous ne ferons plus de voyageb, c’est la peur affreuse que j’en ai qui me fait manifester tout haut cette crainte. Cher bien-aimé, je donnerais plus de la moitié de ce que j’ai à vivre pour faire un petit voyage annuel, comme ceux que nous faisions pendant l’autre moitié. C’était si doux, si bon, si ravissant que je pleure souvent de bonheur et de regret en y pensant. Il n’y a pas un incident du voyage, pas un pli de terrain, pas un vol d’oiseau, pas un nuage dans l’air dont je ne me souvienne comme si c’était tout à l’heure. Il n’y a pas une de tes espiègleriesc d’enfant, pas un de tes sourires, pas une de tes douces charmantes paroles dont je n’aie gardé la mémoire. Ô je t’aime mon Victor. De te le dire seulement, cela m’emplit le cœur de joie et de bonheur. J’espère que tu viendras ce soir. Ce vilain temps ne peut pas continuer longtemps. Cependant si cela pouvait te fatiguer et te faire du mal, je me résignerais à ne te voir que demain. Mais j’espère que je ne serai pas privée du bonheur [de] te voir ce soir. Je le désire de tout mon amour.

Juliette

BnF, Mss, NAF 16360, f. 176-177
Transcription de Jeanne Stranart assistée de Florence Naugrette

a) « 23 août ». La date a été corrigée par une autre main que celle de Juliette.
b) « plus de voyages ».
c) « une de tes espièglerie ».

Notes

[1Du 19 août au 8 septembre 1845, La Presse publie un feuilleton, Teverino de George Sand.

SPIP | | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0
(c) 2018 - www.juliettedrouet.org - CÉRÉdI (EA 3229) - Université de Rouen
Tous droits réservés.
Logo Union Europeenne