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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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18 janvier [1849], jeudia soir, 4 h.

Je n’avais pas eu le temps de t’écrire ce matin, mon cher bien-aimé. J’avais préféré, ne pouvant pas tout faire à la fois, ne pas te faire attendre et être prête quand tu viendrais tantôt. Je me remets au pair maintenant et avec l’espoir que tu reviendras ce soir avant de rentrer chez toi. Eh ! bien, mon cher petit homme, l’Académie m’a-t-elle donné raison ? Est-ce bien le Nisard qui l’emporte ? Il me semble que cela doit être et que, puisqu’elle avait le choix, elle a dû naturellement prendre le pire [1] et puis je vous demande un peu de quoi je me mêle ? Vraiment il n’y a plus de Juju. Où allons-nous, où allons-nous, grand Dieu. Cela me serait égal pourvu qu’il n’y ait aucune république au bout et que nous fussions libres de nous promener bras dessus, bras dessous sans en rendre compte à personne. J’avoue que je suis assez médiocre républicaine pour préférer n’importe quelle monarchie qui nous donnerait le loisir d’être ensemble et d’être heureux. Je donnerais tous les présidents et les 899 représentants qui en font partie pour un jour entier passé avec toi. Voilà jusqu’où va mon patriotisme.

Juliette

Leeds, BC MS 19c Drouet/1849/20
Transcription de Véronique Heute assistée de Florence Naugrette

a) « jeudi » est écrit en surcharge par Juliette Drouet sur « mercredi ».


18 janvier [1849], jeudia soir, 4 h. ½

Je t’écris coup sur coup comme lorsqu’on a bien soif et qu’on boit sans reprendre haleine. C’est que ton absence m’altère l’âme d’une horrible façon et qu’il ne faudrait rien moins que des flots de tendresse et d’amour pour la rafraîchirb. Malheureusement ce n’est pas dans mon encrier que je peux me désaltérer et tout ce que je fais me rend la soif de toi encore plus inextinguible. Ce n’est pas de ma faute et tu ne peux pas m’en vouloir à moins d’être le plus injuste des mortels et le plus représentant des hommes. J’espère que vous allez venir ce soir. Si non j’irai vous chercher. Oh ! mais c’est que je le ferais plus que je ne le dis et nous verrions si votre tour d’Auvergne [2] est aussi inexpugnable que Gibraltar. Je vous conseille pour éviter toute invasion de vous rendre………..c chez moi de bonne grâce et d’y rester le plus longtempsd possible. Dites donc, vous, vous me devez neuf francs. J’en suis fâchée, mais il faut me les rendre. Je n’ai pas besoin d’encourir les chances d’une faillite. C’est bien assez de la HIDEUSE BANQUEROUTE PROCHAINE et INÉVITABLE. D’ailleurs je n’ai pas de confiance en vous. Vous savez cela ne se commande pas. Je vous adore, voilà tout. Juliette

BC MS 19c Drouet/1849/21
Transcription de Véronique Heute assistée de Florence Naugrette

a) « jeudi » est écrit en surcharge sur « mercredi ».
b) « raffraîchir ».
c) Les onze points de suspension commencés à la fin du feuillet 3 s’achèvent au début du feuillet 4.
d) « long-temps ».

Notes

[1Alexis de Saint-Priest est élu, au troisième tour, à l’Académie française.

[2Victor Hugo demeure au 37, rue de la Tour-d’Auvergne, sur la colline de Montmartre, depuis le 15 octobre 1848.

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