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Édition des Lettres de Juliette Drouet à Victor Hugo - ISSN : 2271-8923

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10 janvier [1849], mercredi après-midi, 2 h. ¼

Je ne sais pas où vous êtes mon amour, mais je sais trop bien où je suis. Je ne sais ce que vous faites, mais je vous attends. Je ne sais pas si vous pensez à moi, mais je vous aime. De tout cela il résulte que je trouve le temps long et ma patience trop courte. Si vous étiez bien aimable vous vous abouteriez au bout de ces deux choses afin que les deux bouts de mon amour et de mon bonheur se joignent une pauvre fois aujourd’hui. Pour ne pas manquer l’heure de midi ½ j’ai mis les bouchées de mon déjeuner, ma blanchisseuse, ma toilette en quatre pour aller plus vite et pour ne pas vous faire attendre. Je me suis même imposéa la privation de ne pas vous écrire ce matin. À quoi cela m’a-t-il servi ? Sinonb à vous attendre plus longtemps et avec encore plus d’impatience que d’habitude. Vous voyez bien que vous ne savez pas vous arranger. Pauvre doux être adorable, je te grogne pour ne pas te dire des douceurs parce que je crains de te blaser. Mais le fond de ma pensée et de mon cœur c’est que tu es le meilleur et le plus charmant des hommes, que tu as une patience angélique et une douceur DIVINE. Je voudrais passer ma vie à te servir à genoux. Je t’adore mon sublime Toto.

Juliette

Leeds, BC MS 19c Drouet/1849/04
Transcription de Véronique Heute assistée de Florence Naugrette

a) « imposée ».
b) « Si non ».


10 janvier [1849], mercredi après-midi, 2 h. ½

Penseras-tu à m’apporter ton pardessus, mon cher petit bien-aimé ? Il pourrait bien se faire que le tailleur en question vînt ce soir. Je voudrais t’épargner l’ennui et la fatigue de toutes ces choses fastidieuses d’économie et de ménage. Malheureusement ce n’est pas en mon pouvoir. Cette impuissance m’agace par moment et me décourage. Ce serait si doux de m’occuper de toi, d’être ton intendante, ta bonne que je ne peux pas m’empêcher de regretter à toute occasion les soins que je pourrais prendre de ta chère petite personne et de tout ce qui en dépend. Quand j’y pense cela me rend triste et malheureuse. Cher adoré, je te préoccupea de mes ennuis au lieu de tâcher de faire diversion aux tiens par beaucoup d’amabilité et de courage. C’est très bête et je m’en veux de ne pas mieux savoir me contraindre que ça. Heureusement que tu es fort et courageux pour nous deux, toi, et que tu portes toutes les contrariétés de cette vie avec une aisance calme et sereine que j’envie et que j’admire. Tu n’es pas un grand homme seulement par le génie, tu l’es par la patience ineffable et la mansuétude sublime qui ne te quittent jamais. Aussi mon amour ne se lasse pas à te vénérer, à t’admirer et à t’adorer à tous les instants de ma vie. Dans ce moment-ci je voudrais pouvoir baiser tes pieds. Tu ne sauras jamais, mon Victor, combien je t’aime et comment je t’aime. Tout ce que tu pourrais imaginer et souhaiter est au-dessous de la vérité.

Juliette

Leeds, BC MS 19c Drouet/1849/05
Transcription de Véronique Heute assistée de Florence Naugrette

a) « préocupe ».

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