Guernesey, 27 avril 1859, mercredi, 7 h. ½ du m[atin]
Bonjour, mon cher petit homme ; bonjour dans la paix de mon cœur et de mon âme et à travers l’ouragan de la tempête du bon Dieu qui ne dérage pas depuis quelque temps. On dit que vous aimez cette NOTE-LÀ, aussi le MUSARDa [1] éternel vous la sert tous les jours à grand orchestre. C’est beau mais dur aux rhumatismes et ma pauvre carcasse se passerait bien de tous ces TRÉMOLOS qui me font sauter entre deux draps et me tordre sous mes couvertures en marquant la mesure par des grognements plaintifs. Sans compter que jusqu’à présent, je n’ai pas pu profiter de l’agrandissement des jours à cause du froid. Cependant, il va falloir que je m’y mette, dussé-jeb empoigner quelque BONNE attaque de goutte carabinée. Je le désire presque pour avoir le droit de m’installer CARRÉMENT en malade et pouvoir COPIRE sans dérangement dans mon lit toutes les belles choses qui me passent devant le nez et sous la plume de ma et de MES CONCURRENTES gribouillantesc ou gribouilleuses. En attendant que je prenne ce parti, je vous aime à tire-d’âme.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16380, f. 111
Transcription de Mélanie Leclère assistée de Florence Naugrette
a) « MUZARD ».
b) « dussai-je ».
c) « gribouillante ».