11 juin [1844], mardi matin, 8 h. ⅟₂
Bonjour mon cher adoré. Bonjour toi. Bonjour vous. Bonjour je t’aime. Comment vas-tu ce matin ? Comment m’aimes-tu ? Je pense avec joie à demain ou après-demain. Tu sais que tu m’as promis d’être avec moi dans deux ou trois jours et en voilà déjà au moins UN d’écoulé. Je serai bien heureuse aujourd’hui. D’espérer seulement, cela me rend heureuse. Il faut tâcher cependant de venir le plus que tu pourras en attendant car je suis bien seule bien seule quand je ne te vois pas. Je voudrais bien aller AUX MARRONNIERS [1], MOI. [dessin]a. Ma plume n’est pas assez bonne, c’est ce qui est cause que mon dessin est médiocre. Cependant, on peut reconnaître une main exercée même dans cet informe gribouillis. Je suis sûre qu’un amateur me le paierait encore bien cher. Taisez-vous, vilain, que je vous voie dire le contraire et vous aurez affaire à moi. Il fait un temps à manger tout cru. J’ai une soif de vous qui ne peut pas s’exprimer, je ne sais pas ce que je ne ferais pas pour être avec vous tout de suite en plein champ, en plein-air, en pleine liberté. En attendant, je suis là, j’espère et je désire, je m’impatiente et je t’aime. Pense à moi, mon adoré, aime-moi et viens me voir le plus tôt que tu pourras.
J’attends le Triger ce matin. Suzanne va bien je crois, quoiqu’elle se plaigne encore [2]. Eulalie est toujours une bonne et charmante personne dévouée, et moi, je t’adore.
Juliette
BnF, Mss, NAF 16355, f. 137-138
Transcription de Mylène Attisme assistée de Florence Naugrette
a) Dessin où ils sont aux restaurant Les Marronniers :
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