9 avril [1837], dimanche soir, 11 h.
Mon cher et bien-aimé petit homme, je ne veux pas vous gronder quoique vous ayez l’air de le mériter beaucoup. Je veux attendre avant vos explications, je serai trop heureuse de les trouver bonnes. J’ai passé ma soirée en compagnie de Mme Pierceau et de son petit garçon qui a été bien désappointé de ne pas aller à Saint-Antoine [1] comme je le lui avais promis. Quant à moi je ne regrette pas Saint-Antoine comme vous pouvez bien le croire mais je regrette cette soirée passée sans vous voir. Je regrette toutes mes bonnes pensées d’amour qui se sont envolées par la cheminée ne trouvant pas d’autre issue. Je regrette mes bons baisers bien tendres qui se sont desséchés sur mes lèvres n’ayant pas les vôtres pour les y déposer. Enfin je regrette une soirée de vie et de jeunesse perdue puisque vous n’en avez pas profité, gaspilleur de temps et d’amour que vous êtes. Pour me consoler un peu, j’ai copire tes beaux vers sur la trahison et l’hypocrisie d’un ex faux ami [2]. J’en ai admiré toutes les expressions, c’est sublime et triste comme le combat de l’aigle contre la vipère.
J’entends la porte d’en bas, mon cher adoré, j’espère que c’est toi et mon cœur bat d’impatience et de joie. Oh ! oui c’est toi, c’est bien toi. Je vais te baisera
BnF, Mss, NAF, 16330, f. 34
Transcription de Chantal Brière