Guernesey, 27 mai [18]70, vendredi, 2 h. après midi
Restitus desheurée [1], mon doux adoré, mais amour toujours présent. Aujourd’hui j’ai commencé ma journée PAR UN FORT BRANLE-BAS dans toute ma maison. Triage des journaux depuis deux mois ; fermeture provisoire des cheminées jusqu’à ce qu’on les fasse ramoner, placement des magnificences dont tu m’as comblée hier. Tout cela m’a pris le meilleur de mon temps, sans compter le grand marché desjouré [2] lui, aussi, en l’honneur de cette stupide vieille laide et bête et reine Victoria. Enfin me voici horte comme on dit ici de tout mes farragosa [3] de ménage et j’en profite dare, dareb, en te bâclant mon gribouillis à tire-plume car j’ai encore à me débarbouiller avant quatre heures. Dites donc, môssieur, vous avez oublié quelque chose de mon cœur hier en vous en allant. Que je vous y reprenne encore et puis vous verrez. Je serai aussi sévère pour vous que pour moi je vous en préviens. Pour cette fois je vous pardonne à la condition que vous ne m’en aimerez que plus. Cher adoré je ris parce que je sais que tu es heureux et parce que je sens que je t’adore.
BnF, Mss, NAF 16391, f. 147
Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette
a) « pharagos ».
b) « dar, dar ».