Guernesey 20 avril [18]70, mercredi matin, 6 h.
Bonjour, mon doux adoré, bonjour, comment la nuit ? J’espère qu’elle sera à la hauteur de la mienne, si non : « ma tante pas contente » [1]. Que dis-tu de ce soleil ? J’espérais qu’il t’attirerait dans ton lucoot et que ta bannière [2], plus intéressante pour moi que celle de Mme Olympe Audouard [3], FLOTTERAIT dans l’air pour la plus grande joie de mon cœur. Il paraît que la fournaise n’est pas encore assez ardente pour y cuire ta sciatique et y faire éclore tes vers à… toi [4]. Cela étant, tu fais bien de rester là où tu te trouves confortable, comme on dit dans cette île toujours entourée d’eau. À ce propos, je pense que tu ferais bien, par excès de précaution, de mettre un treillis de fer autour de ton bassin pour que Petit Georges ne puisse jamais dans aucun cas tomber dedans. Quelques verges suffiraientb et pourraientc resservir chaque fois que les enfants seraient chez toi. Il n’y a qu’à le poser sur le sol, ce treillis, et à l’enlever les enfants partis. Je livre ce conseil à ta sagesse qui n’en n’a pas besoin, certainement. Pour avoir l’occasion d’épancher ma sollicitude pour ce cher petit homme et mon admiration pour le Tout grand Homme.
BnF, Mss, NAF 16 391, f. 111
Transcription de Jean-Christophe Héricher assisté de Florence Naugrette
a) « lucoot ».
b) « suffirait ».
c) « pourrait ».